La Presse : Il y a conspiration

Le Journal « La Presse »

Il y a conspiration

La presse internationale désigne M. Guiga du doigt

 

Le Maghreb du 14/1/1984

 

Notre confrère La Presse de Tunisie a ouvertement parlé dans son éditorial du Mardi 10 janvier de conspiration.

La presse écrit : « après avoir été convaincu de l’existence d’une conspiration qui visait l’autorité et l’image du Premier Ministre, le Président Bourguiba (…) a tranché.

La Presse publie dans le même numéro une série de dépêches d’agences de Presse internationales, qui, toutes, portent un doigt accusateur à l’adresse du M. Driss Guiga.

Associated Press

L’Agence américaine A.P. écrit : « A première vue on pourrait croire selon un schéma classique que M. Guiga fait office de bouc émissaire. Il semble qu’il n’est est rien et qu’il ait réellement des responsabilités dans les dix jours de fièvre qu’à connus le pays.

Tous les témoignages concordent – qu’ils proviennent de milieux diplomatique occidentaux ou des sphères dirigeantes tunisiennes – : on prête à M. Guiga des ambitions politiques certaines et il semble qu’il ait cherché à tirer profit de la crise. On insiste dans ces milieux sur quatre points relativement accablants pour l’ancien ministre de l’Intérieur.

  • Les forces de l’ordre ont laissé les troubles se développer sans intervenir pendant plusieurs heures mardi au centre de Tunis et plus particulièrement dans le quartier de Bab Souika, au cœur de la Médina, où plusieurs bâtiments publics et privés ont été incendiés et pillés. Or ce quartier est le fief des indicateurs de la police qui ne pouvaient ignorer les préparatifs et les évènements qui s’y sont déroulés.
  • Il semble que le gouvernement et plus particulièrement le Premier ministre n’aient pas été informés de l’ampleur du mécontentement populaire par le Ministère de l’Intérieur.
  • Le bilan des évènements est très lourd. Pourquoi, se demande-t-on dans les milieux consultés, n’avoir pas d’abord eu recours avant d’ouvrir le feu à des moyens plus classiques et plus pacifiques de dispersion.
  • L’accusation la plus grave : un des bras droits du Préfet de Police de Tunis, Ezzedine Driss, ancien dirigeant du Parti Destourien, aurait « encouragé » à la fin des manifestations de joie de vendredi une partie de la population à scander des mots d’ordre hostiles au Premier Ministre, ce dernier entretenant de notoriété publique, les plus mauvaises relations avec le ministre de l’Intérieur.

En clair : il semble que M. Driss ait joué la carte de la stratégie de la tension afin de devenir l’homme fort et providentiel du pays et qu’il ait échoué.

 

REUTER

L’Agence Reuter quant à elle estime que : « On reprochait à M. Guiga notamment d’avoir laissé se multiplier les désordres sans réagir immédiatement et fermement, et on se demandait, dans tous les milieux, s’il n’avait pas fait preuve de carence ou même de « connivence ».

Le doute a ainsi plané durant vingt quatre heures sur l’avenir politique du Premier ministre duquel ses adversaires pensaient avoir triomphé.

Dans les milieux informés, on estime que les adversaires de M. Mzali ont joué vendredi « leur va-tout » dans la rue mais ont finalement perdu la partie.

 

Le Quotidien de Paris

Le Quotidien de Paris analyse la conspiration comme suit : « La première carence, du moins dans l’ordre chronologique, dont le ministre de l’Intérieur est rendu responsable, c’est tout simplement la défaillance des Renseignements généraux. Il est hors de doute, en effet, comme l’a, d’ailleurs, reconnu le Premier ministre, que le Gouvernement a été pris au dépourvu par l’explosion de colère de la population, comme par l’exploitation qui en a été faite, notamment à Tunis, par des groupes extrémistes. Les forces de l’ordre ont ensuite laissé les troubles se développer pendant plusieurs heures mardi au centre de Tunis, et notamment dans la Médina, avant d’intervenir. Elles ont, un peu partout, multiplié les signes d’affolement, ce dont témoignaient en particulier les conversations des policiers sur la bande FM captées par certains Tunisois et ce qui a sans doute contribué à alourdir le bilan de ces journées.

 

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