Conférence de presse De Gaulle du 5 septembre 1961

Bizerte : conférence de presse De Gaulle du 5 septembre 1961

 

Bizerte n’a jamais été couvert par l’O.T.A.N. et je ne crois pas qu’il le sera jamais.

La France, qui serait de toute manière impliquée d’une manière directe dans la défense des deux bords de la Méditerranée. Alors quand on a considéré ces réalités-là, on comprend que la France ne veille pas et ne puisse pas, dans l’actuelle situation du monde, s’exposer elle-même, exposer l’Europe de Bizerte par des forces hostiles. Voilà pourquoi la France a établi une base à Bizerte.

Du côté de Tunis, nous pouvions penser que tout en proclamant la souveraineté de la Tunisie sur Bizerte, souveraineté qui n’a jamais été contestée en principe du côté français et qui ne l’est pas, et tout en déclarant qu’il faudrait qu’un jour soit négocié le retrait des troupes françaises, on comprenait que la situation générale ne comportait pas actuellement cette issue. L’échange de lettres qui a eu lieu, le 17 juin 1958, entre mon gouvernement et celui de Tunis, et qui a réglé le retrait des forces françaises exceptait Bizerte de ce retrait, et du côté français, que c’était une sorte d’engagement à l’expectative et à la temporisation.

Quant le Président de la République tunisienne a été reçu par moi-même à Rambouillet le 27 février dernier et que la question de Bizerte est venue dans nos entretiens, je lui ai dit de la façon la plus nette que la situation étant ce qu’elle était, la France ne pouvait et ne voulait pas quitter Bizerte. Et je dois dire qu’il m’a paru s’en accommoder. Du reste, après ces conversations, il s’est répandu en déclarations amicales à notre égard. Entre temps il affirmait à plusieurs reprises que pour le Maghreb la question essentielle était le règlement de la question algérienne et que, tant que cette affaire-là n’aurait pas abouti, il ne poserait pas la question de Bizerte pour ne pas ajouter à la complication des choses.

Il faut dire qu’au cours des entretiens de Rambouillet le Président de la République tunisienne avait réclamé au Sahara une rectification de frontière en faveur de la Tunisie et aux dépens de l’Algérie. Cette rectification de frontière devait ménager, en quelque sorte, un accès futur à la Tunisie vers le Sahara. Et du reste, M. Bourguiba ne cachait pas que ce n’était là qu’une étape et qu’il visait, au plus profond du désert, la région d’Edjélé où se trouvent, comme on le sait, d’importants gisements d’Edjélé n’a jamais été habitée par qui que ce soit et leurs recherches. Mais enfin, il y avait là un signe maintenant par d’autres que des nomades très clairsemés, des explorateurs épisodiques de grottes, et des touristes passagers, au désert saharien. J’ajoute que tout semblait se passer comme si la décision amicale aboutir l’oléoduc d’Edjété en Tunisie, au lieu de le diriger sur l’Algérie comme celui d’Hassi-Messaoud, ce qui procurait à l’Etat tunisien – en définitive aux frais de la France – des redevances qui n’étaient pas négligeables, conférait un titre à cet Etat pour réclamer la source du Pactole. Nous avons fait connaître à l’époque à M. Bourguiba que, du moment que nous étions en train d’aider à naître un Etat algérien qui ne pourrait pas ne pas être intéressé au premier chef par le Sahara, et pendant que nous étions en train, également, de consacrer dans le désert beaucoup de nos initiatives et beaucoup de nos investissements, nous n’allions pas inconsidérément, découper la souveraineté sur les pierres et sur les sables et la distribuer en tranches. La question du Sahara ne pouvait être étudiée normalement et réglée, à ce moment-là, avec la Tunisie. C’est alors que se produisit l’agression tunisienne d’une part, sur notre territoire au Sahara, d’autre pas sur nos installations à Bizerte.

Nous  n’avions rien d’autre à faire, et nous n’avions rien fait d’autre, que de maintenir l’intégrité de notre territoire au Sahara et de rétablir les sûr, nous le ferons encore le cas échéant. Mais nous ne cessions pas, depuis longtemps, et récemment encore, d’abord les conditions d’un modus videndi à Bizerte et ensuite celles de l’utilisation de la base dans la période dangereuse que le monde connait actuellement.

Puisse Tunis en tenir compte pour trouver avec Paris un arrangement qui soit conforme au bon sens. C’est là le souhait de la France.

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